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jeudi 26 mai 2022
Mot du Président délégué à l’occasion d’une table ronde tenue au sein de la Chambre des conseillers sur le thème de : « La femme dans le système judiciaire : de sujet à intervenante dans le changement et le développement » lu en son nom par Mme. Latifa Taoufik, Cheffe du Pôle des affaires judiciaires du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire.

Mesdames et messieurs ;

« La femme est source de toute chose » Socrate l’a affirmé et nous le réaffirmons aujourd’hui. ; lorsqu’elle est valorisée, la femme devient la plus solide des forteresses de la société et du monde. Permettez-moi avant toute chose d’exprimer mon admiration aux organisateurs de cette importante table ronde  pour la précision du choix de son thème : « La femme dans le système judiciaire : de sujet à intervenante dans le changement et le développement » car ce n’est pas un simple titre monotone d’une rencontre intellectuelle mais un résumé relatant la réussite de la femme marocaine dans tous les domaines, y compris celui de la Justice qui fut parmi les premiers à accueillir les femmes en reconnaissance de leur place essentielle parmi les composantes de la société.

Nous avons donc amplement raison d’être fiers ; tout d’abord parce que la première femme arabe dans l’histoire moderne à avoir intégré le domaine de la justice était marocaine. En effet, Mme. Amina Abderrazak a occupé le poste de juge au début des années soixante du siècle dernier, c’est là une indication forte de la ferme conviction que le développement durable ne peut être atteint que par les efforts conjoints des hommes et des femmes.

Sans doute est-il que ce statut dont ont bénéficié les femmes marocaines tout au long de l’histoire en général et plus particulièrement depuis l’indépendance de notre pays, est principalement dû à l’attention portée au fil de l’histoire par les monarques marocains à la femme et leur souci de garantir ses droits, puisqu’ils n’ont pas ménagé d’efforts pour permettre son émancipation et appuyer sa participation active au processus de développement en ouvrant devant elle la voie pour accéder aux postes de responsabilité et lui permettre d’occuper le statut qu’elle mérite au sein des différents domaines.

L’histoire du Maroc a, à plusieurs occasions, gravé en lettres d’or l’attention paternelle accordée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste, aux affaires de la femme et sa bonne gouvernance qui a permis de consacrer la parité de la femme avec les hommes sur plusieurs plans, notamment en renforçant son rôle dans le Code de la famille, en institutionnalisant ses acquis en vertu du Code de la nationalité marocaine et du livret de famille, ou encore en lui octroyant tous ses droits et en bannissant toutes les formes de discrimination exercées sur elle.

Mesdames et messieurs ;

Notre pays a très tôt compris que l’élévation du statut de la femme au sein d’une société conservatrice où règne encore l’image stéréotypique de la femme vulnérable, passe par l’adoption de mécanismes de promotion et de protection de ses droits, consistant d’une part à consacrer le principe d’égalité, et de l’autre, à adopter le mécanisme de discrimination positive à son profit.

Le principe d’égalité des droits, des responsabilités et des chances ne signifie pas nécessairement que les femmes et les hommes deviendront égaux en tout point, mais signifie en réalité que l’attribution des droits et des responsabilités et l’octroi des chances ne se fera pas sur la base du sexe mais plutôt sur la base des capacités et compétences.

Ainsi, en vue de consolider les réformes constitutionnelles et législatives ayant été accomplies et ayant consacré le principe de parité entre les deux sexes, celui-ci a été constitutionnalisé de manière expresse par la Constitution de 2011 dont le préambule prévoit que : « le Royaume du Maroc s’engage à bannir et combattre toute discrimination à l’encontre de quiconque en raison du sexe ».

L’article 19 de la Constitution prévoit par ailleurs que : « l’homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental » et que « l’Etat œuvre à la réalisation de la parité entre les hommes et les femmes. Il est créé, à cet effet, une Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination. »

Le Royaume du Maroc a en outre adhéré à plusieurs conventions internationales, que le manque de temps ne nous permet pas d’exposer, et veille constamment à honorer ses engagements en harmonisant ses législations avec leurs dispositions.

Il faudrait noter que le principe de parité n’aurait pas suffi à lui seul à réaliser les stratégies, objectifs et programmes fixés s’il n’avait pas été conjugué à l’adoption du mécanisme de discrimination positive au profit des femmes, à travers la garantie de leur accès aux postes décisionnels tel qu’il ressort des dispositions de l’Article 115 de la Constitution qui garantit une représentation des magistrates parmi les dix membres élus, dans la proportion de leur présence dans le corps de la magistrature. Ce mécanisme est ce qui a permis à notre pays de progresser sur la voie du remodelage de la conscience collective qui n’était pas habituée à ce que les femmes occupent ce type de postes ; ainsi, le résultat escompté a été atteint et les femmes ont pu non seulement faire leurs preuves de manière concrète et pragmatique mais aussi démontrer qu’elles sont capables de surpasser les hommes.

Mesdames et messieurs ;

Sans doute est-il que la preuve la plus concrète de la transition faite par la femme juge du statut de sujet à celui d’intervenante dans le changement, réside dans les chiffres enregistrés par notre système judiciaire et que le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire note dernièrement avec grande satisfaction. En effet, le nombre de femmes juges a considérablement augmenté au cours des dernières années tant au niveau de leur accès à la magistrature qu’au niveau de leur accès aux postes de responsabilité, à l’échelle nationale et internationale.

Cette année, le nombre de femmes juges a atteint 1068 femmes juges d’un total de 4218, soit 25% des magistrats du Royaume, 78% d’entre elles occupent des postes de conseillères près les Cour d’appel avec un total de 829 conseillères. Pour ce qui est des tribunaux spécialisés, la circonscription de la Cour d’appel de commerce de Casablanca compte à elle seule 58% de l’ensemble des magistrats et conseillers de cette circonscription.

Les femmes juges marocaines sont aujourd’hui présentes dans plusieurs tribunaux de fond sur l’ensemble du territoire marocain et assument la responsabilité de servir la nation même dans les régions les plus éloignées, fidèles au serment qu’elles ont prêté ; citons à titre d’exemple la Première présidente de la Cour d’appel de Ouarzazate, la Présidente du Tribunal de première instance de Laâyoune, la Présidente du Tribunal de première instance de Souk Sebt Oulad Nemma, la Procureure du Roi à Oujda etc…

Il est à noter que les femmes juges se montrent toujours prêtes à supporter les charges de cette profession éreintante, et ce depuis leur période de formation à l’Institut supérieur de la magistrature, pendant laquelle les attachées de justice obtiennent les premières places lors des examens de fin d’études et s’accaparent parfois les dix premières places du classement comme fut le cas dans plusieurs des dernières promotions.

Et si les chiffres enregistrés concernant la présence des femmes juges dans les postes de responsabilité judiciaire ne reflète pas le volume de leur présence réelle au sein des tribunaux, cela est principalement dû au fait qu’elle ne prennent pas l’initiative de postuler aux postes de responsabilité à cause de leurs engagements familiaux ; ce qui a poussé le Conseil à mettre en place des orientations stratégiques visant à garantir la parité dans l’octroi des responsabilités, en encourageant les femmes juges et en les sensibilisant à l’importance de présenter leurs candidatures et en les incitant à accéder à ces postes compte tenu du besoin du pouvoir judiciaire de l’appui des femmes juges au processus de réforme que mène Sa Majesté le Roi, que Dieu l’assiste.

Ceci dit, la présence de femmes au sein des postes de responsabilité a connu une augmentation significative au cours des dernières années puisque le nombre de femmes responsables judiciaires s’est élevé à 18 dont 3 magistrates membres du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, une première présidente de Cour d’appel, 5 présidentes de tribunaux de première instance et 9 procureures du Roi près ces tribunaux. Les femmes juges ont également pu grâce à leur persévérance présider 8 comités au sein des Chambres et sections de la Cour de cassation et prendre ainsi part au rôle crucial que joue cette Cour dans l’unification de la jurisprudence et la garantie de la sécurité judiciaire.

Le Conseil énumère à ce jour 38 femmes substituts de responsables judiciaires dont 2 substituts de premiers présidents de Cours d’appel, 20 femmes substituts de présidents de tribunaux de première instance et 16 premières substituts de procureurs du Roi.

Pour ce qui est du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, la présence de la femme y est remarquable, puisque le nombre des femmes y travaillant à atteint 178 femmes, soit environ la moitié du nombre de ses fonctionnaires, lesquelles remplissent diverses fonctions dont cheffes de pôles, de services ou d’unités ou encore magistrates ou conservatrices judiciaires, auxquelles s’ajoutent les femmes occupant d’autres postes de différents rang et grades.

Aborder ce point est l’opportunité parfaite pour saluer l’approche paritaire suivie par le Conseil et qui est prévue par la Constitution et méritée par les femmes.

Mesdames et messieurs ;

 L’accès des femmes juges aux postes de responsabilité ne s’est pas limité au niveau national seulement puisque la femme a réussi, grâce à ses compétences, à prendre part à des expériences internationales réussies qui lui ont valu estime et appréciation. En effet, la femme a été première présidente de la Cour d’appel de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, les sciences et la culture (UNESCO), et aussi membre du Tribunal administratif de l’Union africaine, membre au sein de comités internationaux tel que le Comité des Nations Unies contre la torture, sans oublier son accès au poste de Juge de liaison à l’étranger. Tant de réalisations qui amplifient notre confiance en les compétences de nos femmes pour le leadership, le changement, le développement et la contribution à l’élévation de notre pays au rang des Etats leaders dans le domaine des droits de la femme.

Pour finir, je tiens à saisir l’opportunité de ma présence en ces lieux dont les femmes et les hommes ont participé à l’élaboration de l’arsenal juridique qui fait notre fierté pour féliciter et remercier avec ferveur, et avec toute l’assurance en l’aptitude de la femme à relever les plus difficiles des défis, tous ceux ayant planifié, organisé et contribué à la réussite de cette rencontre. Je conclue mon discours en souhaitant aux femmes qui sur leur voie vers la gloire ont atteint des postes de cadres, toute la réussite qu’elles méritent ; wa assalamou alaykoum wa rahmatou Allah.

M’hammed Abdennabaoui,

Président délégué du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire.  

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